MAI 1997 ✗ « Putain Dwayne casse-toi de là ! » Ça c’était Sarah qui était une fois de plus en train de râler après son frère qui lui cassait à nouveau les pieds pour la énième fois de la journée. Dwayne avait cinq ans à peine, mais c’était déjà un sacré casseur de pied. Il aimait embêter, pour rester poli, ses parents comme sa sœur de trois ans son ainée. Sarah était l’une de ses têtes de classe à à peine huit ans, mademoiselle Je sais tout comme les autres aimaient bien appeler ce genre de femmes, mais cette dernière s’enfichait pas mal après tout. Leurs parents, Shelly et Bryan, respectivement secrétaire médicale et vendeur automobile pour Porsche, étaient des plus tendres avec eux. Enfin, ils l’étaient surtout quand leurs enfants l’étaient aussi avec ces derniers car par moment, les crises étaient inévitables et le ton devait être haussé dés cet instant où leurs petits protégés commençaient à se crêper le chignon car oui, imaginez un peu le petit Dwayne qui embêtait déjà sa sœur à à peine cinq ans, alors avec quelques années de plus, les choses n’iraient sans doute pas en s’arrangeant, bien au contraire. Mais que voulez-vous, le monde était fait ainsi, pour qu’entre frères et sœurs on se tape sur la gueule à tout bout de champ au cours de notre enfance histoire de faire passer le temps et d’échanger quelques moments qui nous font mal sur le coup mais qui au final, finiront vraiment par nous rapprocher. Parce qu’être frères et sœurs ce n’est pas seulement se dire que l’on peut se reposer sur quelqu’un, c’est aussi avoir des différents afin de mieux avancer en quelque sorte. C’est tout naturel en fin de compte, mais il y a toujours les parents pour s’interposer en cas de débordement, bien que par moment, une bonne claque dans la gueule de l’autre suffit à les calmer tous les deux. Du moins, pour un petit moment, jusqu’à ce que le perdant ne décide de prendre sa revanche quelques minutes, quelques heures, voir quelques jours plus tard.
JANVIER 2008 ✗ Miami, c’est la ville parfaite pour grandir. La plage, le soleil, la mer, les filles en mini-short tout l’année, bref, il n’y avait qu’une ombre au tableau pour le jeune Dwayne, l’équipe de basket de la ville qu’il n’aimait pas plus que ça et qu’il s’efforçait d’encourager afin de ne pas décevoir son père. Si le blondinet avait un rêve, c’était bien celui de se tirer de cette ville et pour partir sur la côte Ouest du pays, à Los Angeles plus précisément. Les Los Angeles Lakers, l’équipe qu’il vénérait plus que tout mais qu’il se tenait de cacher.
« Monsieur Hamilton, en vu de vos notes catastrophiques dans mon cours, vous êtes tenu d’écouter ce dernier et non pas de vous endormir sur votre table. A moins de vouloir repiquer une seconde fois. » Première année de lycée pour Dwayne et ce, pour la seconde fois. Il détestait tout ce qui tournait autour des sciences et n’avait jamais vraiment essayé de s’y intéresser. Ces notes avaient été si catastrophiques l’année précédente que son lycée n’avait pas hésité à le faire redoubler afin de lui remettre les idées en place, mais les choses ne semblaient pas aller pour le mieux. Rien ne semblait pouvoir faire décrocher de bonnes notes à Dwayne en mathématiques. Puis, qu’est-c’qu’il en avait à faire ? Il brillait en histoire tout comme en langues mais aussi en littérature et c’est tout ce qui lui faisait plaisir lui qui rêvait de devenir traducteur et de voyager à travers la planète. Fan de basket, on aurait pu penser qu’il ait voulu se lancer là-dedans, mais il ne voyait que ce sport comme une passion et qu’il ne devait pas en faire son métier au risque d’en être dégoûté au final. Il n’avait pas énormément voyagé avec ses parents, mais le peu de voyages qu’il avait fais avec ces derniers lui avait donné l’envie de découvrir encore plus de pays et encore plus de cultures. Écrivain, c’était aussi quelque chose qui le branchait, mais rester chez lui à pianoter sur son ordinateur pour écrire un roman pendant de longs mois n’était pas son passe-temps favori.
30 JUILLET 2010. ✗ « Je croyais que c’était seulement pour quand j’aurais obtenu mon diplôme comme Sarah. » « J’estime que t’as aussi le droit d’avoir ta propre voiture pour sortir et je sais que tu es quelqu’un de résonné, c’est pour ça que je fais ce cadeau maintenant. » « Je t’ai déjà dis que je ne pouvais pas rêver avoir meilleur père ? » « Non mais c’est toujours un plaisir de le savoir. » Non, contrairement à ce que l’on pouvait croire, Dwayne n’allait pas recevoir une nouvelle voiture car il n’en demandait pas autant. Enfin, il recevrait celle que son père s’était acheté il y a trois ans de cela, lorsqu’il avait offert son ancienne voiture à sa fille aînée, tandis que son paternel récupérerait une toute nouvelle voiture flambante neuve. Il était d’ailleurs en chemin pour la récupérer en compagnie de Dwayne alors que sa femme travaillait. Sarah quant à elle, n’était plus à la maison, elle avait déménagé pour New-York afin de poursuivre ses études en chant et danse à l’université de Columbia. Ça avait toujours été son rêve, partir pour New-York, allez savoir pourquoi. Dwayne l’avait toujours critiqué pour cela quant à elle, elle l’avait toujours critiqué pour pouvoir partir à Los Angeles. Il suffit d’une fraction de seconde pour que la vie de la famille Hamilton bascule à tout jamais. Un grand fracas et se fut le noir et le silence complet. Quand Dwayne ouvrit les yeux, il fut aveuglé par la lumière blanche et vive que dégageait sa chambre d’hôpital et il ne fit que les entre-ouvrir au final, et encore. Il fallut ainsi pas moins d’une heure au jeune blondinet pour retrouver entièrement ses esprits et se rendre compte de l’endroit où il se trouvait. Sa mère se trouvait à son chevet, installée sur une chaise, elle tenait la main de son fils dans la sienne tout en caressant la paume de cette dernière. C’est là qu’il comprit qu’il avait passé une semaine dans le coma et que son père avait été enterré trois jours auparavant.
SEPTEMBRE 2010. ✗ « Oh s’il te plait, t’es devant mon casier là ! » « Et alors ? » « Bah tu crois ? Que je suis venu là pour chier dedans ou quoi ? » « Bon allez casse-toi et laisse-le récupérer ses affaires petit con. » Mia était la meilleure amie de Dwayne. Ils s’étaient connus il y a trois ans de cela, lors du redoublement du jeune blondinet tandis que la jeune femme faisait son entrée dans le lycée. Ils se trouvaient tous deux dans la même classe et c’était rapidement entendu l’un et l’autre, se découvrant des passions communes. Malheureusement, ils ne sont ensemble en cours qu’une année, ayant été séparé l’année suivante alors que la jeune femme s’était penchée sur des études scientifiques contrairement à Dwayne qui c’était lancé dans des études littéraires. Malgré tout, ils ont toujours su resté proches. Le jeune homme passa le mois suivant l’accident en fauteuil roulant, ne pouvant à peine tenir sur une jambe suite à sa sortie de l’hôpital. Au lycée, c’était la misère pour se frayer un chemin ou atteindre son casier. Les choses allèrent de mieux en mieux avec le temps et ce malgré ce bout de chemin en fauteuil dû se poursuivre par quelques semaines en béquilles alors qu’il arrivait à tenir sur au moins un pied. Il pensait qu’il avait traversé le pire suite à la mort de son père, qu’il n’y aurait pas d’autres événements plus traumatisant que cet accident dans lequel il avait aussi faillis laisser sa vie, mais il se trompait, et lourdement. Nous étions en février et sa mère avait un rendez-vous à l’hôpital. Après les cours, il vint la récupérer afin de lui éviter de prendre un taxi pour rentrer. Et tout bascula une fois de plus lorsqu’on vint à lui annoncer que sa mère était atteinte d’une maladie incurable. Les médecins ne donnaient généralement pas plus d’un an aux patients qui étaient atteint de cette maladie, mais Dwayne n’y croyait pas. Un an, c’était bien trop court et savoir sa mère condamnait lui était insupportable.
MAI 2011. ✗Comme jamais deux sans trois, la troisième mauvaise nouvelle pour Dwayne arriva au courant du mois de mai, peu avant le début des examens qui annonceront la fin des années lycée. Il profita de son week-end pour sortir avec ses potes comme à son habitude et notamment avec sa petite amie qu’il fréquentait depuis plus d’un an maintenant. Cette dernière avait déjà parlé de ses intentions au jeune homme quant à son avenir et elle comptait, comme sa sœur, partir pour New-York afin de suivre des études de médecine, mais là, elle avait quelque chose d’autre à lui annoncer.
« Dwayne, j’ai quelque chose à te dire. » « Oui ? » « Je… je suis enceinte. » Il s’arrêta de marcher, tournant son regard vers la jeune femme.
« Je ne m’y attendais pas, je pensais pas que ça se pouvait, je pensais juste être malade mais non… c’est bien plus. » Elle avait les larmes aux yeux, il le voyait et il s’empressa de la prendre dans ses bras, la serrant contre lui, caressant son dos pour la rassurer.
« Je serais là… je serais là pour toi, je ne te laisserais pas seule. » Personne ne sut jamais rien de sa grossesse, hormis leurs familles respectives et quel choc se fut pour Shelly, la mère de Dwayne qui craignait de ne plus être présente pour voir celle qui serait sa petite-fille. Le jeune homme travailla d’arrache-pied entre les cours et après, à la fois pour ne pas que sa mère et lui ne se retrouve à la rue, mais aussi à cause de la fille qu’il allait accueillir d’ici quelques temps mais se fut à nouveau le drame pas même deux mois plus tard. Début juillet, il avait roulé à toute allure jusqu’à l’hôpital où se trouvait Kelly qui avait, il semblerait, fait une importante chute dans les escaliers. Il se retrouva seul avec elle dans sa chambre d’hôpital.
« Tu vas bien ? » « Je veux que tu partes Dwayne… Je ne veux plus jamais te revoir, tu m’entends ? » « Kelly, arrête, tu délires et notre… » « Elle est morte tu comprends pas ? Cette chute m’a provoqué une fausse couche maintenant pars. Toi et moi c’est fini, tu m’entends ? » Et il parti. Sans un mot de plus.
JANVIER 2012. ✗ « Et vous la gardez pour combien de temps ? » « Jusqu’à ce qu’elle puisse marcher à nouveau, au minimum bien sur. » La mère de Dwayne avait fait un malaise plusieurs minutes auparavant et l’ambulance n’avait pas tardé lorsque le jeune homme avait contacté les urgences. Ces derniers temps, elle était faible, mangeait à peine et oublié certaines choses. Le blondinet regrettait de ne pas avoir été trop présent ces derniers jours mais avec son boulot, il ne pouvait pas toujours la surveiller. Il comptait donc sur son chien pour faire le travaille à sa place, mais son aide ne valait pas celle d’un être humain. Il passa quelques jours sans sa mère dans son appartement, allant la voir à chaque fois qu’il terminait de travailler. Il avait fais le choix de ne pas continuer ses études afin de faire vivre autant sa mère que lui. Mais les choses ne tournèrent pas en sa faveur dans l’après-midi du seize janvier deux mille douze lorsqu’il quitta son travail…
« Maman, je suis là ! » Aucune réponse.
« Maman ? » Il s’avança dans l’appartement, entrant dans le salon, découvrant sa mère allongée sur le canapé. Il s’approcha d’elle, pensant qu’elle s’était endormie mais son chien léchait la main de la jeune femme qui ne bougeait pas. Il Sa poitrine ne se soulevait plus et il comprit de suite. La descente aux enfers commença là pour Dwayne. Manque de nourriture, manque de sommeil, enchaînant cauchemars sur cauchemars, ne sortant plus de chez lui sauf pour travailler, il était littéralement au bout du rouleau et autant dire que l’idée de mettre fin à sa vie lui avait traversé l’esprit. Il n’avait plus aucune nouvelle de sa sœur, son père était mort tout comme sa mère, il ne lui restait plus rien, hormis ses amis qu’ils voyaient à peine, tous plongés dans leurs études. Ils sortaient juste pour se faire un cinéma une fois par semaine et cela s’arrêtait là. Ils étaient malgré tout la dernière chose à laquelle il s’accrochait, eux et cette fille qu’il avait connu quelques mois plutôt, une jeune femme venue de Londres qui avait une correspondante dans sa classe et qui avait passé quelques semaines ici avant de retourner chez elle avant la fin de l’année scolaire. Cette fille avec qui il parlait dés qu’il le pouvait via internet et ce malgré le décalage horaire.
FÉVRIER 2012. ✗« Ana ? » « Euh oui… On se connait ? » « Dwayne… Dwayne Hamilton, on s’est connu l’année dernière au lycée. » « Oh oui Dwayne, je ne t’avais pas reconnu ! » Il était vrai que le jeune homme avait teint ses cheveux en brun suite à la mort de sa mère, sans aucun doute signe de deuil alors que ses cheveux étaient d’un blond éclatant avant cet évènement. Le brunet se trouvait à l’aéroport, attendant le moment de pouvoir embarquer dans l’avion qui l’emmènerait à Los Angeles. Avec les économies qu’il avait fais depuis un moment, il s’était payé un aller simple et voilà qu’il venait à croiser la jeune femme, assise sur un siège de l’aéroport, attendant elle aussi un vol il semblerait. Avec son accord, il vint à s’installer à côté de l’anglaise.
« Je te croyais à Londres. » « Je pars pour Los Angeles, mon vol avait une escale ici, j’ai de suite pensé à toi. » Elle lui adressa un sourire, sourire qu’il lui rendit du mieux qu’il le pouvait.
« Et tu vas y faire quoi là-bas ? » « Retrouver mon fiancé. » Le sang de Dwayne ne fit qu’un tour dans sa tête suite aux paroles d’Ana. Il essaya de ne pas se laisser déstabiliser mais au fond, il souffrait, peut-être parce qu’avec le temps et après avoir tant parlé avec cette dernière, il cachait quelque chose de bien plus fort que de la simple amitié et il savait que tout espoir était perdu maintenant qu’elle était fiancée. Mais il apprit que cela n’avait pas été son choix mais celui de ses parents, des gens de la haute société comme les parents de son actuel fiancé qui avaient trouvé un accord pour réunir leurs deux enfants. Elle lui avoua qu’elle n’était pas amoureuse de lui, du moins pas encore, parce qu’intérieurement, il n’était pas ce qu’elle attendait. Lui, il s’intéressait plus à l’argent, à la fortune d’Ana qu’à cette dernière comme il le devrait. Alors l’espoir vint à renaitre en partie en lui. Il avait trouvé à nouveau quelque chose à quoi s’accrocher dans cette misérable vie. Ana.